vendredi 12 janvier 2007

Im-pa-tien-ce ci-toy-en-ne


DE Saint-Armand sur le Web
Billet aigre-doux
Janvier 2007

C'était, le 8 janvier dernier, la première assemblée publique du Conseil municipal de Saint-Armand de l'année 2007. De mémoire d'homme, c'est l'assemblée régulière publique la plus courte jamais tenue par ce Conseil. En plus de nos élus (moins une), étaient présents une douzaine de citoyennes et citoyens qui s'intéressent encore à la vie municipale.

Le Conseil actuel arrive bientôt à mi-mandat. Après avoir assisté pratiquement à toutes les assemblées publiques depuis la dernière élection, j'ose faire ici quelques observations sur la façon dont évolue ce dernier bastion de notre démocratie locale.

Les membres de notre Conseil municipal sont des hommes et des femmes consciencieux et dévoués qui pour la plupart ne comptent ni leur temps ni leurs énergies quand il s'agit de bien gérer les biens collectifs de Saint-Armand avec un budget annuel approchant les 2 millions de $. À ce chapitre, ils méritent notre confiance et notre soutien. Mes propos ne remettent pas du tout en question la qualité et l'intégrité, ni même les choix des personnes qui se sont vues confier l'administration de nos taxes foncières.

Je me questionne cependant sur leur conception de la démocratie municipale -- en particulier celle du maire Réal Pelletier --, considérant le peu d'importance qu'accorde ce Conseil à l'information et à la participation des citoyens qu'il représente. Il ne s'agit pas là d'une affirmation gratuite : je l'illustrerai par des faits bien précis qui ont marqué l'année 2006 et par le rappel des orientations récemment annoncées par le maire pour les trois années qui viennent.

Saint-Armand n'est pas une communauté tissée serrée. C'est plutôt une collectivité en courtepointe. La municipalité regroupe deux villages, des hameaux centenaires, des développements résidentiels plus ou moins récents, plusieurs fermes isolées et quelques industries primaires. Tous ces groupements sont caractérisés par leur diversité socio-culturelle et leurs particularités géographico-historiques. Le paysage naturel armandois est tout aussi varié; comme le sont ses ressources et son économie, d'ailleurs. Les habitants bien enracinés ou récemment transplantés dans l'ex-seigneurie de René-Nicholas Levasseur ont cependant quelque chose en commun : un profond attachement à leur milieu. (La première fois que j'ai emprunté le chemin Saint-Armand, c'était en mai 1978, je me suis dit spontanément : « C'est ici que j'aimerais dorénavant vivre et mourir! » Plusieurs depuis m'ont d'ailleurs dit qu'ils avaient eu une réaction semblable en découvrant l'endroit.)

La municipalité actuelle est l'aboutissement de plusieurs fusions administratives à travers l'histoire, la plus récente étant celle des villages de Philipsburg et de Saint-Armand-Ouest en 1999. Qui dit fusion dit éloignement des résidants du pouvoir décisionnel. (Je serais curieux, par exemple, de savoir combien de parents dont les enfants fréquentent encore l'école Notre-Dame-de-Lourdes à Saint-Armand s'inquiètent de ce qui se passe aux séances des Commissaires qui, depuis la dernière fusion des Commissions scolaires, se tiennent à 60 kilomètres d'ici...) Ces fusions faites au nom de 'la rationalisation' amènent avec le temps les administrateurs à 'oublier' l'identité locale (la vraie vie, quoi) : efficacité oblige. Conséquences : atténuation du sentiment d'appartenance à la communauté dont on se sent de moins en moins partie prenante, désaffection à l'égard du pouvoir public qui nous ignore et, en bout de ligne, déclin des valeurs démocratiques. C'est là, selon moi, la principale raison de l'indifférence de plus en plus généralisée face aux élections municipales et scolaires; et c'est ce qui, localement, explique en grande partie que tous les membres du Conseil municipal actuel de Saint-Armand ont été nommés par acclamation en 2005.

Face à cette situation, nos 'élus' locaux ont deux choix : se cantonner comme si de rien n'était dans leur rôle d'administrateurs légitimes de la municipalité ou s'ingénier à trouver des moyens pour que leurs concitoyens se sentent concernés par la vie municipale et s'impliquent activement dans le développement de leur communauté.

Or, pour ranimer la démocratie au niveau local, il n'y a pas 56 moyens : cela passe d'abord par l'information des citoyens et ensuite par une ouverture à leur participation active au développement de leur milieu.

Dans cet article, nous allons nous arrêter à l'information; dans un article subséquent, il sera question de participation.

Le Conseil et l'information des citoyens

L'année 2006 a été marquée par une initiative sans précédent et très prometteuse du Conseil de Saint-Armand au chapitre de l'information municipale : la soirée d'informations du 31 mai sur un projet de zonage local de production. Nous avons été nombreux ce soir-là à répondre à l'invitation du maire Réal Pelletier, à venir le questionner avec ses experts invités sur le cadre législatif du zonage et sur le projet à l'étude, nombreux aussi à exprimer nos attentes pour que notre milieu naturel soit protégé. L'événement amena même un groupe de citoyens à déposer un document de recommandations quelques jours plus tard, lors de l'assemblée publique régulière du Conseil.

Autre initiative prometteuse du Conseil municipal en 2006 au chapitre de l'information : la parution d'une chronique -- « La mairie vous écrit... » -- dans chaque numéro du journal bi-mensuel Le Saint-Armand. « Le Conseil municipal de Saint-Armand a décidé de participer au financement du journal Le Saint-Armand en achetant un espace dans ses pages. Il servira à favoriser la communication et les échanges entre tous les contribuables et le Conseil municipal sur des sujets importants », pouvait-on lire en préambule à la première chronique, sous la plume du conseiller Martin Landreville.

Favoriser la communication et les échanges... Contre toute attente, ces deux initiatives n'ont cependant pas fait long feu. Le maire Réal Pelletier vient d'annoncer qu'il n'y aurait plus de chronique dans le journal, l'entente étant échue. Quant à l'étude des recommandations issues de l'assemblée d'informations du 31 mai, elle est reportée d'une séance du Conseil à l'autre depuis l'adoption par ce dernier en juillet dernier du libellé initial de la MRC à peine modifié (Résolution 06-07-2086).

Deux autres projets initiés en mars 2006 et liés à l'information municipale sont demeurés jusqu'à maintenant lettres mortes. Le premier, mis de l'avant par la conseillère Ginette Lamoureux Messier, d'utiliser le site Web de la CRE (Conférence régionale des élus de la Montérégie-Est) pour y diffuser gratuitement les avis et communiqués du Conseil. Le deuxième, cette initiative mise sur la table par le conseiller Martin Landreville de créer un site municipal de type blogue en vue d'y informer et d'y consulter en ligne la population locale sur les sujets abordés aux assemblées du Conseil (Résolution 06-04-2006). Or, huit mois plus tard aucune information émanant du Conseil n'a encore été diffusée via le site de la CRE Montérégie-Est. Quant au projet d'un blogue ou d'un site Web officiel pour la municipalité, après des mois et des mois de tergiversations pour réserver l'adresse URL saint-armand.qc.ca auprès de l'ACEI, il est mis sur la glace : le maire vient en effet d'annoncer que le projet de site Web municipal serait remis à l'ordre du jour en 2008, au moment où l'accès Internet haute vitesse devrait être disponible partout dans la municipalité.

En décembre dernier, tous les contribuables de Saint-Armand recevaient par la poste le 2e numéro du Bulletin de l'hôtel de ville avec le « Rapport du maire à tous les contribuables de la municipalité de Saint-Armand ». Dans ce rapport, il n'est fait aucune mention des précédents projets sauf celui de l'implantation d'Internet haute vitesse d'ici 2009 (!); l'information municipale ne figure pas non plus dans les orientations annoncées pour les trois prochaines années.

Il serait incorrect de ne pas mentionner quelques gestes posés par le Conseil en 2006 au chapitre de l'information : celui d'avoir procédé à l'installation d'un système d'amplification qui corrige en grande partie la mauvaise insonorisation de la salle communautaire où se tiennent les assemblées du Conseil; celui aussi d'avoir favorisé la diffusion des projets d'ordre du jour et des procès-verbaux dans Saint-Armand-sur-le-Web -- un service public que nous offrons gratuitement; celui enfin d'avoir accordé une plus grande importance et une plus grande flexibilité à la période des questions lors des assemblées et de l'avoir programmée à heure fixe.

Mais c'est beaucoup trop peu...

Les membres du Conseil actuel ont le devoir de faire en sorte que le scénario des dernière élections municipales ne se répète pas en 2009 à Saint-Armand. S'ils doivent alors être réélus, il serait normal que ce soit à l'occasion d'une élection démocratique avec un vote en bonne et due forme. Pour cela, il leur faut entretenir l'intérêt des Armandois et des Armandoises pour ce qui se passe dans leur municipalité en les informant régulièrement de l'évolution des différents dossiers. Tout simplement parce qu'il n'y a pas meilleure stratégie pour susciter une saine et constructive opposition démocratique!

Informer risque de faire évoluer les choses en suscitant des commentaires, des suggestions, des questions, des remises en question, bref, de l'opposition. Informer et consulter permet aussi d'engendrer des consensus constructifs mobilisateurs : la soirée d'informations du 31 mai sur le zonage de production en est une belle illustration.

Ne pas informer peut cependant avoir des conséquences bien plus néfastes : la méfiance, la procrastination, la banalisation, la suspicion... Pire encore, le désintérêt et l'indifférence. Autant d'attitudes qui, à plus ou moins long terme, ne peuvent être que préjudiciables à la démocratie municipale.

Pour ne pas rester théorique, je rappellerai quelques-uns des thèmes dont les tenants et aboutissants sont demeurés plus ou moins obscurs malgré qu'ils se soient plus d'une fois directement ou indirectement retrouvés inscrits à l'ordre du jour des assemblées publiques du Conseil municipal de Saint-Armand en 2006 :
  • la contribution de la municipalité pour stopper l'euphorisation chronique de la baie Missisquoi -- les cours d'eau sont de compétence municipale depuis janvier 2006;

  • l'implication municipale dans la révision du projet provincial de parachèvement de l'autoroute 35 dont l'impact risque d'être majeur sur l'avenir de Saint-Armand -- selon l'avis même du BAPE;

  • la hausse du rôle d'évaluation et les choix budgétaires qui justifient celle des taxes foncières malgré des surplus budgétaires -- hausse de 7,5 % à partir de 2007, annoncée verbalement par le maire;

  • l'implication de la municipalité dans le socio-culturel -- que prévoit faire le Conseil pour que Saint-Armand, maintenant désigné « carrefour culturel », en devienne véritablement un?;

  • le soutien au développement économique local -- qu'entend faire le Conseil municipal pour éviter que ne se reproduise l'échec d'initiatives commerciales récentes pourtant prometteuses?;

  • la conservation du patrimoine et la transmission de l'histoire du milieu -- la conservation de la mémoire collective doit-elle être laissée à la bonne volonté des individus et aux institutions extérieures; n'est-elle pas plutôt une responsabilité collective locale?;

  • l'accès pour tous à une connexion Internet à large bande -- comment expliquer que les nombreuses démarches soient infructueuses jusqu'à maintenant malgré d'importants déboursés pour des études;

  • le site Web officiel de la municipalité en vue de consulter les citoyens sur les sujets à l'étude aux assemblées du Conseil -- pourquoi le reporter en 2008 après en avoir si souvent parlé en 2006?;

  • les recommandations proposées à la suite de la soirée d'information du 31 mai 2006 en vue de définir la phase 2 du zonage de production -- qu'en advient-il?
Voilà autant de dossiers pour lesquels les citoyennes et les citoyens de Saint-Armand méritent d'être mieux informés parce c'est nous tous qui en assumons les frais en bout de ligne. Et d'autres encore, dont ceux qui ont fait l'objet d'articles dans Le Saint-Armand : celui de la déforestation à des fins d'épandage et celui des importants investissements consentis par le Conseil pour le pavage des rangs. L'entretien de nos chemins et leur patrouille par la Sureté du Québec constituent les deux plus importants postes de dépenses municipales...

J'ai rappelé précédemment l'événement citoyen de l'année 2006 à Saint-Armand : la soirée d'informations du 31 mai au Centre communautaire. Je rappellerai en terminant un autre événement, moins récent mais tout aussi marquant : le grand rassemblement au terme du concours « Invente ton village! », auquel Robert Crevier avait convié nos jeunes en 2004. Ces deux événements éminemment rassembleurs ont un point en commun : celui d'avoir été une occasion de faire s'exprimer publiquement les rêves citoyens.

Je souhaite que nos élus locaux - le maire Réal Pelletier en tête -- créent un climat plus ouvert au dialogue avec la population afin que tous puissent partager leur vision de Saint-Armand et travailler ensemble à en réaliser ce qui nous est commun à travers des projets rassembleurs, structurants, constructifs et enrichissants (dans les deux sens du mot).

Jean Trudeau
p.s. - Deuxième volet à venir
Le Conseil municipal et la partipation : le sous-développement guette Saint-Armand si les citoyens ne s'impliquent pas dans leur milieu. Il y a des signes qui ne trompent pas.



Documentation en ligne :
  1. Procès-verbaux des assemblées du Conseil municipal
  2. Recommandations d'un groupe de citoyens concernant le zonage de production
  3. Le comité consultatif d'urbanisme (CCU) - Document du MAMR

Aucun commentaire:

Publier un commentaire

N.B. - Pour vous identifier simplement, choisissez le profil 'Nom/URL' et inscrivez votre nom; l'URL est facultatif. Les commentaires inconvenants seront éliminés. jt