jeudi 1 décembre 2005

Ouvrir ou fermer nos églises?

Billet aigre-doux

D'ici le 11 janvier 2006, soirées publiques d'information et de discussion sur l'avenir de la communauté et de l'église dans les cinq paroisses que dessert l'Unité pastorale des Frontières. La première avait lieu le 21 novembre 2005 à Philipsburg et rassemblait une vingtaine de personnes, une dizaine si on exclut les membres du comité de réflexion venus présenter l'état de la situation. Celle de Saint-Armand, le 24 novembre 2005, regroupait une cinquantaine de personnes incluant les membres du comité.

J'ai noté quelques chiffres qui donnent un aperçu de la situation.
  • Sur le territoire de l'Unité pastorale des Frontières, 7,5 % de la population catholique fréquente l'église. Selon les chiffres du dernier recensement (2001), Saint-Armand-Philipsburg compte 748 catholiques sur une population de 1247 habitants.

  • Sauf à Bedford, chaque église est l'hôte d'une célébration un dimanche sur deux : en moyenne, 14 % des places sont alors occupées, dont près de la moitié par des paroissiens de l'extérieur; en moyenne, chaque église est ouverte au culte 29 heures par année. Coûts fixes de chaque célébration : 350 $ à l'église Saint-Philippe de Philipsburg; 463 $ à l'église Notre-Dame-de-Lourdes de Saint-Armand.

  • Selon les paroisses, entre 20 et 28 % des paroissiens paient la dîme (40 $/an). Nos paroisses bouclent leur budget grâce à la générosité de fondations ou à des revenus provenant d'activités de financement. L'Unité pastorale des frontières fait face à un déficit de 387 000 $.

  • Actuellement, le diocèse de Saint-Hyacinthe compte 84 prêtres dont 56 sont affectés aux 104 paroisses; en 2015, il restera 27 prêtres ayant moins de 69 ans dans le diocèse; deux candidats sont en formation vers la prêtrise.

  • Il est de plus en plus difficile de recruter des bénévoles dans les paroisses; il faut parfois faire appel à des personnes de l'extérieur pour les besoins des cérémonies liturgiques.

  • Dans certaines paroisses dont les nôtres, un ou deux enfants seulement participent aux activités d'initiation à la vie chrétienne (qui remplacent les cours de catéchèse qu'on élimine graduellement dans les écoles du Québec maintenant déconfessionnalisées).

  • Beaucoup d'églises du diocèse ont été ou sont en voie d'être reconverties, notamment celle de Sainte-Sabine (édifice municipal) et trois à Granby (gymnase, CLSC, bibliothèque...); des projets sérieux d'acquisition sont à l'étude, entre autres à Sorel où 2 églises répondraient aux besoins (il y en a 4) et à Saint-Hyacinthe où 3 suffiraient (il y en a 11).

Ce n'est là qu'un bref aperçu de la situation décrite par le comité de réflexion sur l'avenir de nos communautés et de nos églises : ne serait-ce que pour prendre conscience du drame qui se vit actuellement dans nos paroisses, assister à ces soirées en vaut la peine. L'aspect financier ('le nerf de la guerre') y est notamment décrit dans ses moindres détails -- on y apprend par exemple que le prix chargé pour des funérailles (300 $) n'en couvre même pas les frais! La problématique de survie qui découle de la fragilité financière, est fort bien posée : pas de viabilité possible pour une église sans une plus grande vitalité de sa communauté.

Statistiquement, je fais partie des 92,5 % de croyants catholiques à la recherche de sens qui vivent leur spiritualité en marge de la communauté 'pratiquante'. L'avenir de l'Église et de nos églises m'interpelle pourtant profondément. Notre quête de sens 'hors de l'église' a besoin de signes pour s'alimenter. Or, les signes 'dominants' dans notre société sont plutôt négatifs merci, particulièrement dans les médias : violence, domination et exploitation de l'homme par l'homme; inégalités et dépendances de toutes sortes, réelles comme virtuelles; égocentrisme et mépris allant jusqu'à la destruction de la dignité, de la vie et de la nature elle-même, sous le couvert du plaisir, du développement et de la rentabilité... Réfugiés dans notre individualisme et dans nos chaumières pour échapper au pire, nous avons tellement besoin de signes positifs pour garder un minimum d'espoir vital, comme de voir des gens autour de nous qui continuent à croire en Dieu et à se rassembler pour le prier...

C'est bien là la tragédie. Nos églises doivent fermer faute de viabilité au moment où il faudrait qu'elles s'ouvrent et manifestent leur vitalité pour ostensiblement soutenir notre foi dans la vie et notre espérance dans l'humanité.

Jean Trudeau

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